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Regard sur Michel Macréau

Michel Macréau, « Couple », 1965, dessin à l’encre de Chine sur papier, 27,5 x 44,5 cm

Un dessin de Michel Macréau qui oscille entre onirisme et réalisme

Ce dessin n’est pas centré autour des personnages mais s’étale sur toute la largeur du papier. Ce qui est vu est aussi important que les regardeurs représentés. L’encre paraît délavée pour ne pas arrêter le regard. Le personnage le plus grand n’émerge pas. Il est pourtant bien assis sur sa vie silencieuse que soulignent des lèvres fermées, presque barrées qui condamnent une bouche en cœur au silence. L’oreille n’est pas seulement le signe d’une schizophrénie latente que la force créatrice de l’artiste tient à distance. Elle déverse goutte à goutte les bruits du monde.

Il se développe une impression de diffusion par capillarité. Tout circule, prolifère. Son buste n’est-il pas protégé par deux évocations de palettes nourries de l’intérieur, comme si la peinture ne faisait qu’un avec ses organes qui eux-mêmes se développent, avancent, sont rejoints par des lignes ou des tubes? Sommes-nous dans un univers poétique, onirique ou réel, diurne ou nocturne, libre ou hospitalier, microscopique ou à notre taille ?

Des formes vivantes, souterraines s’ébauchent, jusqu’à ce que le regard s’arrête sur le visage au centre, plus petit, mais souligné par un noir plus dense, l’oeil droit écarquillé, les cheveux ceints d’un bandeau, la joue creusée, entourée de larmes fertiles qui développent des formes autant abstraites qu’organiques, ludiques comme si le rêve rencontrait la vie.

Le dessin est souple et les formes se relient. Assiste-t-on au jeu d’une dépossession de soi?

Macréau souligne ses initiales en noir épais comme le visage, au-dessus de lui. Le couple, ou lui seul dédoublé, regarde ce spectacle d’une vie qui nous échappe et nous dépasse mais nourrit son œuvre, ses dessins, sa peinture. Macréau n’avait pas prise sur les images qui s’imposaient à lui, ou peu.

Il se rapprochait des pensées contemporaines sur les contraintes du langage et de l’inconscient qui interviennent dans nos pensées et conditionnent notre liberté. « Tous ces signes poétiques qui viennent à moi, je ne sais ce qu’ils veulent dire, mais j’ai le souci permanent de leur trouver leur place, dans une démarche esthétique », m’a-t-il expliqué. Cette modestie et cette volonté de ne pas fausser le cours de son inspiration mais de lui donner une forme qui tienne dans le temps lui ont permis des œuvres qui n’ont rien de triomphal mais sont d’autant plus justes.

A.M.

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